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Titre du blog : Mario Bergeron, romancier du Québec
Auteur : Marioromans
Date de création : 01-01-2016
 
posté le 16-04-2018 à 06:32:14

Ange gardien

 

 

La splendeur des affreux
est un roman qui se déroule dans la première moitié du 19e siècle. C'est un récit sans dialogues, ce qui est le cauchemar des éditeurs et un défi pour les créateurs. Les personnages en vedette ont de bonnes raisons de ne pas échanger avec autrui : l'un, Étienne a un défaut d'élocution et l'autre, son épouse Jenny, est muette. Ces deux personnages s'expriment donc à la première personne, comme la voix du coeur. Chacun a sa propre partie du roman, qui contient aussi une troisième séquence, avec leur fille Marie qui...

Vous verrez. Voici le début de cette partie du roman. Je suis certain que vous n'avez jamais rien croisé de semblable, comme narrateur.

 

 

Je m’appelle Marie Tremblay et je suis un ange. En fait, il est assez difficile de concevoir qu’un ange porte le nom de Tremblay, mais quand je vivais sur Terre, c’est ainsi qu’on m’appelait. J’avais onze ans, j’étais la fille d’Étienne, dit le bossu, et de Jenny, dite l’Irlandaise muette. J’étais écolière au couvent des ursulines des Trois-Rivières et je voulais devenir religieuse. Mais je suis morte le 16 juin 1832, peu après mon réveil. Non… j’ai tort de parler de réveil, car voilà trois jours et autant de nuits que j’étais prise de diarrhées violentes et de vomissements incessants. Ma peau avait pris une coloration bleutée.

 

 

Je savais que j’allais mourir. J’en étais très heureuse. M’opposer à la volonté de Dieu m’aurait condamnée à l’enfer. Je souffrais beaucoup, mais je ne me plaignais pas. La force de la prière me soutenait dans cette épreuve terrestre. Les ursulines priaient tout autant, non pas pour ma guérison, mais pour que Dieu m’accueille dans son paradis. Elles avaient descendu mon lit à la chapelle. Je suis morte en regardant Jésus sur la croix. Lui aussi a beaucoup souffert, quand il est décédé, mais il nous a laissé un bon exemple en ne pensant alors qu’à Dieu. Je priais et songeais sans cesse à la promesse faite à ma mère, un peu moins d’une année auparavant: où que je sois, j’allais la protéger et toujours demeurer près d’elle.

 

 

Dieu sait tout. Il n’ignorait donc pas que ma vie était sienne, que je l’honorais à chaque instant de tous les jours. Quand je suis morte, il y avait beaucoup de lumière blanche et de douceur. Mon ange gardien m’a accueillie pour me guider vers le paradis. Le Tout-Puissant s’est penché sur mon cas. La dernière pensée que nous avons avant la mort devient, en quelque sorte, un serment que Dieu respecte. C’est pourquoi il a décidé de faire en sorte que je veille sur ma mère. Pour atteindre ce but, il m’a transformée en ange gardien. Celui que ma mère avait jusqu’alors a été appelé vers une autre mission. Il m’a dit que ce n’est pas de tout repos de travailler comme ange gardien d’une Irlandaise. Cependant, de façon générale, tous les anges gardiens se disent d’accord pour avouer que les humains ne sont pas de tout repos.

 

 

Je suis maintenant la messagère de Dieu auprès de ma mère. Par exemple, quand maman prie, c’est moi qui porte ses offrandes au Créateur. La même chose pour ses confessions. Comme je suis dorénavant toujours près de ma mère, je le suis aussi un peu pour mon père, bien que celui-ci ait son propre ange gardien, très gentil et pas du tout bossu. Les anges voient et entendent tout. Ils sont de tout temps. Je connais l’avenir et le passé. Je sais qui étaient les ancêtres de mes parents. Beaucoup vivent au paradis, mais d’autres souffrent en enfer. Ce que j’ai vu, lors de mes premiers jours de ma mission d’ange gardien, m’a beaucoup chagrinée.

 

 

Je suis morte du choléra. Il s’agit d’une nouvelle maladie que les médecins et les hommes de science de la Terre ne connaissent pas. Des milliers de gens en meurent, alors que d’autres survivent. Les enfants sont très vulnérables face à ce fléau. Au Bas-Canada, les journaux avaient parlé de cette épidémie qui ravageait l’Europe. Plus d’un craignait l’arrivée des premiers navires d’Angleterre, persuadés que tous les immigrants étaient porteurs de la maladie. Voilà pourquoi les autorités de la colonie avaient institué un lieu de quarantaine, sur une grosse île, près de Québec. Tous les navires devaient y arrêter pour une désinfection. Pendant ce temps, les occupants se prêtaient aux diagnostics des médecins et, si je puis dire, étaient désinfectés à leur tour. Une bonne initiative par le genre humain, mais qui, malheureusement, s’était avérée inutile.

 

 

 

 

 

Commentaires

Maritxan le 22-04-2018 à 16:07:38
@ Marioromans:

Oui bien sûr, ce n'est qu'une toute petite partie... mais ça promet !

@+
Marioromans le 21-04-2018 à 18:02:46
Merci. Ce n'est qu'une toute petite partie...
Maritxan le 21-04-2018 à 17:56:21
Comme d'habitude, j'ai plongé dans ton histoire dès la première ligne et je n'en suis ressortie qu'à la dernière phrase. Excellent ! Sourire1
mocasaki le 18-04-2018 à 10:48:24
Bravo à Vous.....

merci pour votre passage ....@+tardNine
Marioromans le 16-04-2018 à 16:25:29
J'avais alors lu un livre sur l'histoire des anges, avec toute la hiérarchie angélique, dont je me suis servi pour m'amuser.

En fait, l'ange gardien, c'est le bas de la gamme, les prolétaires. Mon personnage n'aime pas les séraphins et trouve les archanges prétentieux. Elle rigole aussi quand elle voit que les humains représentent un ange avec une harpe.
jakin le 16-04-2018 à 09:34:39
Bonjour Mario, ce soir je vais intervenir dans la présentation d'un exposé sur l'archange Gabriel...et je crois que je vais me servir de ta narration pour rendre plus digeste ce que je vais leur raconter....