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Titre du blog : Mario Bergeron, romancier du Québec
Auteur : Marioromans
Date de création : 01-01-2016
 
posté le 12-11-2018 à 07:24:38

Bilan : Les Fleurs de Lyse

 

 

Ce roman est une bande dessinée, avec des personnages et des situations volontairement caricaturales. Il est aussi, pour la série Tremblay, mon effort le plus masculin. Oh, il y a certes des roses le long de la route, mais les personnages vedettes sont des bleus. C'est aussi mon roman rock & roll. Je l'aime beaucoup, mais pas dans sa forme publiée, qui me rappelle des mauvais souvenirs.

Pour la première fois, l'éditeur a chialé. Son droit, notez bien, car après tout, c'est son produit. On m'a reproché l'aspect voyou trop prononcé de Baraque Bordeleau et les liaisons trop abruptes de la seconde partie. J'ai dû apporter des modifications, assez rapides, mais qui avaient retardé la mise en marché et qui auraient pu m'empêcher de participer aux deux salons du livre les plus lucratifs : à Trois-Rivières et en Abitibi. J'ai réussi à gagner ce point et je me sentais en mauvaise position pour aboyer car ils changaient encore le titre, pour une mauvaise idée. En effet, le personnage Lyse n'apparaît que dans la seconde partie, après 300 pages. Le vrai titre représentait le contenu entier du roman : Cheveux longs et cheveux gris. Bien sûr, quand je suis redevenu propriétaire de mon texte, j'ai remis les choses en place.

Comme j'ai pu appuyer ce livre par des présences aux salons l'année suivante, j'ai pu entendre des réactions qui m'ont surprises. À cause de l'aspect mâle, je croyais que les femmes n'aimeraient pas le roman. Pas du tout! Elles ont adoré ça. De plus, huit fois sur dix, les visiteurs croyaient que le chevelu de la page couverture était moi-même. Enfin, comment oublier cet homme de l'Abitibi qui cherchait les 45 tours des Indésirables? Je crois que tout le monde s'est amusé, avec ce roman.

 

 

Je n'ai jamais eu profusion de critiques pour mes romans, mais ce ne fut jamais négatif. Celle-ci est la meilleure. Non seulement le journaliste a tout compris, mais il s'est amusé lui aussi. Cliquez pour mieux voir.

 




 

L'extrait! Les Indésirables n'étaient pas de tout repos, comme tout bon groupe de rock. Il y avait des crises, des prises de bec, surtout quand ils devaient se frotter aux excès de Baraque. Voici que Johanne, quinze ans et présidente du fan-club, décide qu'avec ses copines, elle allait chanter avec la formation. Baraque est très content, car il aime tant les filles! Mais voyez ce qui va se passer...



« On va chanter un Supremes, un Shangri-Las, un Pixies Three, un Milady’s et aussi France Gall.         

- France Gall ? Tu vas chanter France Gall ? Tu ressembles à France Gall et tu vas chanter France Gall ?        

- Oui. Si ton espèce d’orchestre niaiseux ne veut pas nous accompagner, on va trouver d’autres musiciens et ne pense même plus à mon anniversaire de naissance, là là.        

- Mes chums ! Vous vous rendez compte ? Un groupe de filles avec nous! Des vraies filles et elles vont chanter France Gall ! Dans mes bras, babies ! »         



Comme Baraque décide à son tour de faire la grève suite à notre refus radical, deux jours plus tard, nous sommes en train de chercher des arrangements pour les chansons des filles, sous le regard attendri de grand-père Roméo. À cause de sa présence, Charles et Mike font un effort surhumain pour se montrer intéressés. Je comprends que ce sont des sœurs qui leur enseignent les harmonies vocales : elles chantent comme des nonnes ! Elles n’ont aucun sens musical !

Baraque grogne comme un roi quand Johanne entonne Nous ne sommes pas des anges de France Gall.        


« C’est bon ! Stiffie que c’est bon ! Baraque est au paradis ! Je vais devenir fou à vous entendre !         

- Merci, Baraque. T’es bien gentil, là là.        

- Quel show ça va être avec vous trois ! J’en ai mal juste d’y penser ! J’crois aussi que vous devriez trouver un nom pour vot’ groupe. Un beau nom pour les plus belles des filles !        

- Eh bien, on y a pensé, là là. Comme nous allons chanter avec les Indésirables comme musiciens, on a décidé de s’appeler les Désirables.        

- Les Désirables ! AAAAA ! Ça, c’est un beau nom ! »        



Je m’étouffe dans ma pomme, tousse en titubant vers Johanne pour lui expliquer que trois filles de quinze ans ne peuvent pas se baptiser les Désirables, ne doivent surtout pas s’appeler les Désirables. Je n’ai pas le temps de terminer que Charles, à bout de nerfs, nous surprend tous avec une de ses rarissimes colères. Le taciturne, lunatique et trop calme Charles lève le ton pour engueuler Baraque, nous ramener à l’ordre et chasser les filles de façon irrévocable. Johanne sort du garage en pleurant.        


« T’as fait pleurer une fille, maudit guitariste !        

- On ne joue pas avec les filles !        

- Je joue avec les filles depuis que je suis petit !        

- Pas de filles dans l’entourage du groupe !        

- Toutes les filles dans l’entourage du groupe, stiffie ! »        


Baraque bouscule Charles, qui pousse Mike, pendant que Gilles, tentant d’émettre son opinion, est arrêté par les trois autres. Je soupire, jette ma pomme, veux prendre la main de Julie pour m’éloigner de ces imbéciles, mais elle refuse mon invitation.

 

« Comme les garçons sont puérils !        

- Oublions ça, Julie, et...        

- Les filles ont le droit de s’exprimer !        

- Oui, tu dis vrai. Par contre, Charles a un peu raison. Aussitôt qu’une fille se mêle à un groupe, c’est un paquet d’ennuis.        

- Quoi ? Tu oses me dire une telle horreur ? À moi qui ai écris vos stupides chansons ? Et ta sœur et ses amies qui dépensent tout ce temps bénévolement pour s’occuper de votre fan-club ?        

- Ne te fâche pas.        

- Ad augusta per augusta !       

- Quoi ?         

- À des résultats grandioses par des voies étroites !

- Voilà autre chose ! »

 

 

 

Au début de l'extrait, le nom de Pixies Three est cité comme faisant partie du répertoire des filles. Qui étaient-elles? Un obscur groupe féminin  américain ayant rencontré des succès minuscules dans leur pays, mais qui furent numéro 1 à Trois-Rivières. Johanne ne les nomme donc pas pour rien. Cherchant des renseignements  à propos de ce trio 1962-1965, j'ai eu la surprise de trouver un site Internet, avec photos d'époque, et aussi sur le présent de ces ex-adolescentes devenues femmes dans la cinquantaine et qui donnaient encore des spectacles. Alors, j'ai pris la peine de leur écrire pour parler de leur succès à la radio de ma ville et leur dire que le nom de leur groupe était cité quelques fois dans mon roman. Une des femmes m'a répondu, posé des questions et, surprise, m'a demandé de lui vendre une copie, même si elle ne parlait pas français. Amusante anecdote, non ? Les voici, avec Birthday Party, de 1963.

 

 

 

 

 

Commentaires

Marioromans le 17-11-2018 à 05:15:52
Il n'y a que deux personnes qui viennent ici et aucun n'est de cette plateforme. Je sais que t'as déjà été ici... Je me doute de l'identité de l'autre inconnue : c'est une éditrice qui a refusé un de mes manuscrits en octobre et elle avait réclamé mes résumés et caractéristiques de ce que j'ai chez moi. Je lui ai envoyé et depuis, il y a eu près de 40 visites, sans commentaires.


Les romans cachent toujours quelques choses. J'avais un ami et j'avais tendance à identifier un de ses personnages à son épouse. Il m'avait répondu que j'avais raison.
chocoreve le 16-11-2018 à 23:30:52
Cette critique est en effet excellente !

Tes articles ici, sur chacun de tes romans, ont des histoires incroyables.

Je pense qu'il serait intéressant que tes lecteurs puissent les lire, tu vois un peu comme ceux qui regardent des films en DVD, peuvent voir ce que l'on appelle des "bonus" à la fin des films ...

Moi quand j'aurai lu "perles et chapelet" je relierai ton article.