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Titre du blog : Mario Bergeron, romancier du Québec
Auteur : Marioromans
Date de création : 01-01-2016
 
posté le 08-03-2019 à 02:03:24

Quand les enfants rencontrent Rachel et Jackie

 

 

Lors de leur arrivée à Montréal, pour s'installer dans un quartier francophone, Rachel et Jackie Robinson sont l'objet de curiosité. Les deux américains, sans doute craintifs de se retrouver au coeur d'une communauté de Blancs, ne répondent pas à ces hommes et femmes rodant autour de leur logis. Par contre, Paul et Marie, dix ans (et mariés) ont vite compris qu'en passant par l'arrière, ils auront la chance de voir les deux Noirs de meilleure façon.

Paul et Marie veulent devenir des amis des Robinson. Paul est persuadé que l'homme et la femme sont des francophones, Jackie étant Jacques, puis Robinson est un nom si français, tout comme Rachel.

Rachel Robinson a un jour raconté qu'à leur arrivée à Montréal, il y avait deux enfants, habitant l'étage supérieur, qui ne rataient aucune occasion de regarder dans le logement et de saluer le couple. C'était le point de départ pour écrire ce roman, Les enfants, Rachel et Jackie Robinson : un été 1946 inoubliable à Montréal. J'ai reçu la confirmation que le texte de ce roman sera publié dans quelques semaines.

Voici cette première rencontre.

 

 

 

Il semble que tout le monde ait le goût d’imiter les femmes. « Mine de rien », des badauds de toute espèce passent devant la maison. Paul et Marie sentent qu’ils perdent ainsi leur exclusivité et que le quartier entier leur vole l’idée de devenir les meilleurs amis de Jackie et de Rachel.         

Quand l’athlète sort, au début du lendemain après-midi, les flâneurs sursautent et le suivent du regard. La même chose se produit quand son épouse l’imite, vers quatre heures. Marie a vite noté que si tout le monde désire les voir, personne n’approche et que les Robinson ne répondent pas à cette sollicitude. La fillette se dit certaine qu’ils ont peur. « Toi et moi sommes plus intelligents que les grands. » Elle fait suivre cette phrase mystérieuse à Paul par une explication limpide : « Si tout le monde passe devant et qu’ils ne regardent pas, ça veut dire que Jacques et Rachel sont derrière, à la cuisine. »

Conséquemment, voilà le jeune couple, des fleurs de papier entre les mains, qui cogne à la porte arrière. Ils ont vite vu les Robinson attablés. Les deux Américains regardent rapidement du côté de la fenêtre. Le joueur de baseball approche prudemment, sans ouvrir. Il fronce les sourcils en apercevant ces deux puces souriant généreusement.        

« Bonjour, Jacques! Je suis Paul Gilbert et voici mon épouse Marie. Nous sommes là pour te souhaiter la bienvenue à Montréal et pour te demander d’aider les Royaux à gagner le championnat de la Ligue internationale.         

- Nous voulons devenir tes meilleurs amis et t’aider tout le temps. Pour faire des commissions, par exemple. Paul et moi, on connaît tous les magasins du coin. »        

Jackie, intrigué, ne répond pas. Rachel approche, prend le bras de son époux et lui chuchote quelques mots en anglais.          

« Entre Canadiens français, on va s’entraider.         

- Who are these kids?        

- Paul, il ne parle pas français…        

- C’est impossible… Jacques, tu peux parler en français. On n’est pas aux États, ici. Donne tes fleurs, Marie.         

- Oh oui! Voici ces quelques fleurs de l’amitié

- Ils n’ont rien compris…        

- Parle-leur en anglais, mon amour.         

- Heu… Floweuzes!        

- Comme t’es savant, mon cher époux.        

- Thank you. Say thanks, Jack.        

- Thank you, little girl and little boy.         

- Heu… Heu… Tinque hou aussi. Moi : Paul. Elle : Marie.         

- Paul and Mary.        

- Tu vois? Ils comprennent le français. »           

Fier de ce premier pas, Paul raconte tout à ses parents. Le père demeure estomaqué. « Ce n’est pas très poli, mon petit bonhomme, de cogner aux portes des gens sans raison. Cet homme-là est sans doute très occupé et sa jeune épouse nerveuse parce qu’elle arrive dans un pays étranger, loin de ceux de sa race, dans une ville qu’elle ne connaît pas. » Paul, surpris, avale sa salive. Il imagine que la réplique de sa maman pourrait être plus salée et qu’il sera puni. Cependant, elle le déroute en disant que tout ça n’est pas si grave.        

« Je suis persuadée que cette femme est une bonne personne et qu’elle a compris la curiosité des enfants. Elle ne s’est sûrement pas fâchée.        

- Non, maman. Pas fâchée. Marie et moi, on est demeurés sages.        

- Il ne faut pas en prendre une habitude, cependant. N’oublie pas qu’ils doivent se sentir les bienvenus. »

 

 

Commentaires

Marioromans le 10-03-2019 à 22:25:19
Exactement ! De la part de Paul et Marie, c'est une curiosité démonstrative et qui va s'étendre à d'autres gamins du quartier.
chocoreve le 10-03-2019 à 15:07:23
les enfants sont curieux, et ça arrange bien les parents parfois !
MarioMusique le 09-03-2019 à 04:58:53
Alors remplis ta tête chez moi !!!
Maritxan le 09-03-2019 à 00:43:55
Salut Mario !

Je suis passée hier soir, j'ai lu ton extrait, mais je n'ai pas laissé de commentaire. Manque d'inspiration de ma part. Le fait d'avoir pris des antibiotiques m'a carrément enlevé mon énergie et vidé la tête.