Le roman en cours est en réalité terminé, mais je ne peux m'empêcher d'évoquer la dernière étape de Grand-Regard et le crépuscule, se déroulant au cours des dernières années de la décennie 1940 jusqu'au décès de la femme.
Beaucoup d'épreuves dans la vie de Grand-Regard, dont les décès de son frère Arthur, de sa grande amie Émilienne et de son époux Donatien. Autre épreuve : la femme devient peu à peu aveugle.
Par contre : des flots d'amour autour d'elle, surtout ceux de ses enfants, de ses amies survivantes Violette et Anita. Adèle, approchant de ses 40 ans, retourne vivre chez ses parents, ce qui les ravit beaucoup. Les idées d'Adèle se muliplient, sachant que le bonheur de sa mère, créer, efface les larmes. Par exemple, Adèle fait appel à une petite-fille adolescente, Hélène, comme secrétaire de sa mère. Elle écrit ce que la femme raconte et ne peut pas écrire elle-même. De plus, Grand-Regard arrive encore à dessiner, même en ne voyant presque pas le papier devant elle.
La manipulatrice Adèle, aidée par son frère et sa soeur (jumeaux), ainsi qu'Hélène et une autre petite-fille, Anne, se sert de sa renommée de romancière et de ses feuilletons radiophoniques, fonde sa maison d'éditions dans le seul but de faire connaitre le talent de sa mère. Elle investit dans la production d'une émission de télévision pour enfants, où une comédienne racontera les fables et contes créés par Grand-Regard.
Malgré les larmes et la tristesse, grâce à Adèle, Anne et Hélène, les jumeaux, Grand-Regard se sent heureuse, découvrant même de nouveaux aspects de sa vie dûs à sa cécité. Par exemple, que les autres sens prennent la relève de la vision disparue pour compenser, par le son, le toucher, l'odeur.
Grand-Regard mourra en novembre 1954, à 74 ans, et vivra une agonie très, très hors de l'ordinaire, que je vais vous présenter sous peu.
L'extrait : à quelques semaines de devenir aveugle, Grand-Regard pose le geste suivant :
En sortant du café, Madeleine regarde attentivement autour d'elle. « Je n’aurais jamais pensé que je trouverais belle une rue pleine d’automobiles. » La réflexion allait avoir une suite innatendue, alors que Madeleine s’attable avec une toile vierge, les tubes à sa portée et lentement, très lentement, elle produit une toile étonnante avec, à droite, cette rue mouvementée, dont l’image, vers la gauche, devient brouillard, puis très floue, avant de se terminer dans le noir le plus opaque. Puis la femme a déposé les tubes et les pinceaux dans un petit sac, demandant aux siens de donner le tout à qui le voudra. Ce fut la dernière peinture signée GR et les enfants Dupont, en la voyant, ont essuyé des larmes, sachant ce que leur mère a voulu représenter.