Mario Bergeron, romancier du Québec

posté le 16-07-2018 à 07:05:07

Contrat d'édition

 

 

Ce que vous voyez est la première page du contrat d'édition signé avec VLB Éditeur, en 2008. De façon générale, ce type de document a autour de vingt pages et est d'une lecture aride. Sans doute que vous pensez certaines choses à propos d'une telle entente, en n'imaginant pas certains aspects. Comme ces contrats sont à peu près tous sur le même modèle, voici quelques faits.

 

Un contrat lie un auteur à une maison d'éditions pour X temps, qui ne peut être défini d'avance. Le contrat est valide tant et aussi longtemps que le livre en cause se vend bien, est en demande. Quand il y a mévente, l'éditeur a l'habitude d'avertir la personne que le contrat tire à sa fin. Dans un tel cas, l'auteur redevient propriétaire de son texte.

 

Car pendant tout le temps que le contrat est valide, le texte appartient à l'éditeur, qui peut en faire ce qu'il veut. Ex : format poche, feuilleton dans un journal, adaptation au ciné ou à la télé, refiler le roman à un organisme qui vend par la poste. Dans de tels cas, l'auteur est averti gentiment, mais n'a pas un mot à dire contre une de ces avenues. Parmi les droits de la maison d'éditions : changer le titre du manuscrit! Et ceci, j'y ai goûté trop souvent... L'éditeur décide aussi du résumé à l'endos, du dessin ou de la photo de la page couverture.

 

L'éditeur s'engage à faire la promotion du livre et l'auteur est invité à collaborer, mais à ne pas prendre de décisions. Ceci, je l'avais fait avec mon premier éditeur et je m'étais fait taper sur les doigts.

 

L'éditeur paie annuellement le romancier. Ce qu'on lui donne? La norme au Québec est de 10 % du prix de vente. Comment, comment ? Le type qui a écrit le roman est le moins payé? Absolument. Et encore, si le roman est au catalogue de Québec Loisirs, on reçoit encore moins. Mais qui touche 90 % du prix de vente ? L'éditeur, le distributeur et le marchand (libraire ou autre). Bref, si mon livre se vend 25 dollars, je touche 2 dollars et 50 sous. Pas assez pour acheter un pain tranché. Il faut en vendre pour la peine pour "vivre de sa plume", ce qui est à peu près impossible, au Québec. Les auteurs qui affirment le contraire sont tous des menteurs.

 

Comme je le mentionnais au début, les contrats sont à peu près tous pareils. Le cas de VLB présentait deux clauses jamais vues ailleurs. Si le premier tirage est écoulé, l'auteur peut alors toucher 12 % au lieu de 10 %. Dans le cas de ce roman Ce sera formidable, il y avait un tirage de 3000 copies. Je n'en ai vendu que la moitié. Suffisant pour qu'on m'indique la porte de sortie.

Seconde clause : si l'auteur veut faire publier un livre chez un concurrent pendant qu'il est sous contrat chez VLB, ces derniers ont droit de regard sur le texte et peuvent empêcher une telle parution.

 

Ces contrats n'ont rien de carcans. Je n'y pense même pas. Sauf qu'avoir un de ses textes en format livre sur le marché, c'est excellent pour l'ego. Et rien d'autre.

 

Tags: #contrat
 


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posté le 12-07-2018 à 21:59:59

Femme de métier

 

 

 

Avant les années 1960, le marché du travail pour les femmes était restreint. Ce n'était d'ailleurs pas le but de la société de voir les filles d'Ève exercer un métier. Les exceptions qui le désiraient avaient un champ d'action auquel on ne pense pas, de nos jours : la vie religieuse. Dans les couvents, il y avait des femmes comptables, s'occupant d'administration, de gestion, des musiciennes, des chimistes, des pédagogues, etc.

Il est évident que mon personnage soeur Marie-Aimée-de-Jésus a une foi tiède, d'habitude. Jeune, elle rêvait de devenir enseignante. Cependant, à l'adolescence, elle a réalisé qu'en qualité de laĩque, elle ne récolterait que des miettes et travaillerait dans des conditions minables. Comme enseignante religieuse, tout serait en place pour une plénitude dans son métier.

C'est ce que la jeune femme fera dans son couvent. Au delà d'enseigner, il y aura des réflections sur la pédagogie, des expériences 'sur le terrain' qui enrichiront sa philosophie. De ce fait, soeur Marie deviendra une grande pédagogue, écrivant des livres sur cette science, auteure de manuels scolaires, et, plus âgée, le gouvernement du Québec fera appel à sa science pour les réformes dans le monde de l'éducation.

L'extrait : nous sommes à la fin des années 1930 et voilà notre jeune femme à l'oeuvre dans une nouvelle classe. Le véritable titre du roman est L'amour entre parenthèses, rebaptisé Les bonnes soeurs par la maison d'éditions. Il sera publié en 2013, avec réédition en format poche en 2017.

 

 

La religieuse se tient  devant sa classe avec son plancher ciré, cent fois astiqué par les sœurs converses. Monsieur Léo Vaillancourt, l’homme à tout faire des lieux, a repeint le plafond. La petite bibliothèque se dresse près du tableau noir. Tout au fond, l’immense carte géographique aidera les élèves à comprendre d’où venaient ces lointains ancêtres qui ont fait du Canada un grand pays. La femme affiche un visage de marbre en nommant les élèves une à la fois. Elles ont tant entendu parler de « Sœur Parenthèse », qui est, de prétendre les aînées, très à la mode. Pourtant, elle a l’air aussi sévère que les autres, malgré les jeunes traits doux de son visage. Les élèves maintenant identifiées, sœur Marie-Aimée-de-Jésus garde un lourd silence, et, progressivement, un sourire se dessine sur ses lèvres, provoquant ceux des fillettes, jusqu’à l’éclat de rire de la religieuse. La voilà au cœur d’une volte-face, alors qu’elle frappe le bois de son bureau avec sa grande règle aux extrémités métalliques. « De quoi riez-vous? Répondez! Lucienne Noël, de quoi vous amusez-vous tant? » Les élèves relèvent le sourcil : c’est impossible qu’elle connaisse leurs noms après si peu de temps! Lucienne se lève, bégaie qu’elle ne sait pas.        

« Il faut une raison pour rire.         

- Je l’ignore, ma sœur.         

- Votre ange gardien vous chatouille les pieds?        

- Je ne crois pas, ma sœur.         

- Assise, Lucienne. Irène Bruneau! Levez-vous, mademoiselle Bruneau, et dites-moi pourquoi vous avez ri.        

- Parce que, ma sœur, vous nous avez fait rire.        

- Vous ne l’avez pas cherchée très longtemps, cette réponse, mademoiselle Bruneau. Sur votre siège, s’il vous plaît. Je vais vous le dire, moi, pourquoi vous avez ri. »        

Sœur Marie-Aimée-de-Jésus marche à grands pas, légèrement courbée, tendant ses mains aux doigts raidis, arrondissant les yeux. Soudain, elle s’ancre au sol, et, les bras aux cieux, claironne d’une voix convaincue : « Vous avez ri parce que la vie est belle! »

Que de plaisirs en perspective! Les fillettes ont entendu souvent que toutes les élèves de la Sœur Parenthèse deviennent des premières de classe, fiertés de leurs parents et promesses de récompenses en juin prochain.

À la récréation, une consœur se presse de rejoindre la jeune religieuse et de lui demander :         

« Ça a encore bien fonctionné, votre truc, ma sœur?        

- Certes.        

- Je n’oserais pas le faire… Il n’y a que vous pour y arriver.        

- Il s’agit d’adapter des stratégies de mise en confiance selon les élèves. Vous savez, Dieu me guide encore pour toujours renouveler mes pensées et mes réflexions sur la pédagogie. Soyez cependant aimable de ne pas appeler mes initiatives des trucs. »

 

Tags: #École
 


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posté le 11-07-2018 à 06:16:26

Plan de rédaction

 

Il y a un plan de rédaction pour tous mes romans. Écrire une fiction, c'est entreprendre un voyage. Le plan devient la carte routière, afin d'atteindre la destination.  Parfois, le plan est rigoureux et à d'autres occasion, c'est davantage flexible.

Ce que vous voyez ci-haut est un peu les deux à la fois. Il s'agit d'une partie du plan pour la seconde partie de Contes d'asphalte. Cliquez pour mieux voir.

Comme dans tous mes romans, les chapitres sont thématiques. Il fut décidé, au départ, qu'il y aurait douze chapitres, représentant les mois de l'année.

On voit très bien, en haut, qu'il s'agit du chapitre 5 et que cela se déroule en novembre 1961. Le personnage vedette, Martin, a 11 ans. Le thème de ce chapitre : Manger !

Alors, j'avais établi douze feuilles semblables, avant même de commencer à écrire le roman.

À ce point, je jetais sur la feuille des idées ad-lib, qui me venaient subitement ou en y réfléchissant. Ne jamais oublier de les écrire, car on peut oublier un mardi ce qu'on avait trouvé très bien le lundi.

Quand une idée avait été utilisée, je biffais. Par exemple : l'odeur de la boîte à lunch du père de Martin : un repas chez sa grand-mère ; les détails d'une boîte de chocolats, une visite au restaurant familial Petit Train, etc. Par contre, je n'ai pas utilisé le Dairy Queen (C'est un marchand de glaces.)

Tout en bas. il y a une note pour Martin et une autre pour son grand-père Roméo. Pourquoi ? Parce que j'avais décidé, avant de commencer la création, que chaque chapitre débuterait et se terminerait de la même façon : un récit de l'imagination de Martin (sur le thème choisi) et, à la fin, une histoire, une fable que Roméo lui raconte. 

 

 

Tags: #plan
 


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1. Maritxan  le 11-07-2018 à 13:17:28  (site)

Je vois. C'est une méthode qui marche bien, la preuve… je suis tout à fait d'accord avec l'évaluation de ton manuscrit sur le billet précédent.
Bonne journée Mario !

2. jakin  le 11-07-2018 à 16:26:00  (site)

Très intéressant de pouvoir rentrer dans la construction de l'écriture d'un livre....la méthode donne de bon résultats...

3. Marioromans  le 11-07-2018 à 18:32:03  (site)

Il y a toutes sortes de plans que j'ai élaborés. L'avantage est qu'ils donnent une direction précise et évitent ainsi les moments 'morts'. Ce qui est indiqué ci-haut était suffisant pour atteindre les 20 pages de chacun de mes chapitres.

Exemple : visite chez la grand-mère, qui, on le devine, préparait de succulents repas. Il y a le rituel de préparation, cogner è la porte, donner des nouvelles, mais Martin est près de la cuisine è humer, anxieux de manger et,,, retour è la maison pour soigner son indigestion !

4. Maritxan  le 11-07-2018 à 19:06:59  (site)

Je fais une suite à mon premier commentaire, car je fais allusion à l'évaluation de ton manuscrit que je n'ai pas encore lu. En fait j'aurais dû m'étendre davantage sur le sujet. À mon avis, cette évaluation est aussi valable pour "Le pain de Guillaume". Moi je le vois comme ça.

5. Marioromans  le 11-07-2018 à 19:54:43  (site)

Le pain de Guillaume était davantage branché sur l'Histoire. La traversée de l'Atlantique sur un navire précis, l'arrivée des filles du roy tout autant précisément (avec une véritable Jeanne Aubert), les attaques des Agniers, tout ceci était le quelette du roman.
Gros-Nez est plus caractériel qu'historique.
Mais les deux avaient des plans que j'ai respecté.

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posté le 09-07-2018 à 21:55:40

Évaluation d'un manuscrit

GROS NEZ 

(M. Bergeron)

 

Sur la base des notes qui suivent, prises au fil d’une lecture partielle, voici mon avis :

le sujet est très intéressant et original, le texte est bien écrit, fluide, facile à lire…détente assurée 

Le titre :              accrocheur, audacieux, pique la curiosité, incite à ouvrir le livre, inviteà la découverte…bref, ne restera pas inaperçu, le tout avec humour

 

×           Les premières pages situent le lecteur, donnant un aperçu de ce que l’ouvrage lui réserve;

 

×           Facile à suivre, simple, promesse d’une aventure originale dans la simplicité volontaire d’un quêteux, dans une ambiance humoristique;

 

×           Le lecteur a la chance de partagerle vécu peu commun, énigmatiqued’un itinérant, et donc de mieux le comprendre, mais aussi de voir le monde par les yeux du personnage principal;

 

×           Originalité du sujet, aux antipodes de « notre » modernité qui nous impose parfois un rythme quotidien presque insoutenable, souvent dans l’indifférence et la méconnaissance de l’autre, dans l’anonymat virtuel; contraste entre hier et aujourd’hui;

 

×           Analyse de mœurs, de valeurs, le lecteur apprend ou réfléchit sur la mendicité, l’indépendance totale vis-à-vis de l’argent et des biens matériels, et sur une certaine noblesse du cœur ou fierté de rendre serviceen retour d’un geste généreux;

 

×           Texte saupoudré de souvenirs à saveur historique et de passages cocasses, amusants;

 

×           Pour les lecteurs qui aiment se souvenir;

×           Pour ceux qui aiment apprendre et comparer entre le « hier » et le « aujourd’hui »;

×           Comment les itinérants des campagnes d’autrefois étaient traités par rapport à ceux d’aujourd’hui, dans nos villes…

  

Conclusion :      Publiable

 

 

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Le texte ci-haut est un courriel envoyé par l'éditeur Marcel Broquet, expliquant pourquoi il a accepté de publier mon roman Gros-Nez le quêteux.

 

Les évaluations peuvent prendre différentes formes. Chez mon premier éditeur. c'était une véritable grille, avec différentes catégories, telles "Intérêt", "Syntaxe", "Vocabulaire" etc et les gens du comité de lecture (deux personnes!) donnaient des points de 1 à 10.

 

Ce qui devrait vous surprendre est le début du message, alors que l'homme parle d'une lecture partielle. Il ne faut pas s'en étonner. Je sais que le premier éditeur avait publié les romans de la série Tremblay sans les avoir lus, se fiant au jugement d'évaluation.

 

 

 

 

 


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posté le 08-07-2018 à 06:42:54

Un personnage : le Rio de Trois-Rivières

 

 

 

 

Le Rio était mon bar rock favori de ma ville, au cours des années 1970. Il apparaît brièvement dans mon roman Les Fleurs de Lyse, mais je lui déroule le tapis rouge dans Les Baveux. En fait, le Rio est tant important pour le groupe de jeunes du récit qu'il devient en soi un personnage.

Il y a chez cette bande un attachement profond pour ce lieu où ils "vident les bouteilles et remplissent les cendriers." Alors, je le décris avec amour, avec des souvenirs personnels qui sont demeurés vivants dans mon esprit. Voici un extrait des Baveux, avec une description du Rio. Je souligne que le serveur chauve a réellement existé.

 

 

 

Ce serveur fait peur. Il est non seulement grand et musclé, mais très robuste. On dirait un ancien lutteur professionnel, se faisant surnommer Boris pour nous faire croire qu’il est un soviétique. Qu’il n’ait aucun cheveu sur le crâne le rend davantage menaçant. Les autres n’ont pas l’air plus rassurant. Le chauve approche, nous regarde sans rien demander. Nous annonçons nos marques favorites, puis il revient, dépose bouteilles et verres, tend la main, prend l’argent et s’en va sans dire un mot.         Sauvage est persuadé que ce sont tous d’anciens joueurs de football. Cette optique sert à garder le calme dans le lieu. La musique est forte, les clients rient, mais personne n’ose crier, ni monter sur une chaise. Pour les jeunes ne fréquentant pas le Rio, le club a la réputation d’être « tout croche », alors que je ne peux imaginer un endroit plus militaire. Dans les autres places, ça aboie et tout le monde s’excite. Pire dans les brasseries.        


Si on a les poches pleines de joints, il ne faut pas les fumer dans la boîte. Dans l’escalier d’entrée, ça va. D’ailleurs, en poussant la porte, cette odeur nous frappe, si caractéristique du Rio, avec l’excellence de sa musique. Les serveurs ne refusent jamais une bière à un type déjà ivre. Une fois, j’avais vu un gars vomir. Le chauve était arrivé avec ses chiffons, avait pointé du doigt sans rien annoncer.         

Le Rio est le sous-sol du cinéma Impérial. Il a donc l’apparence d’un rectangle, pas très large. La table où nous nous installons se situe dans l’équivalent du vestibule, avec, à droite, un long bar, puis, à gauche, une loge pour le responsable de la musique, un peu élevée. La section équivalente au cinéma même est longue, complétée par une petite piste de danse. Nous ne fréquentons pas ce lieu, car la musique deviendrait alors beaucoup trop assommante, empêchant de nous entendre. Comme on diffuse là-haut des films jusqu’à onze heures, il n’y a guère de musique au Rio avant la fermeture du ciné. C’est ouvert, mais pas très excitant. La clientèle est au courant de tout ça et fait comme nous, arrivant après onze heures. Souvent, l’un des Baveux me téléphone à onze heures et demi pour me demander de le rejoindre là-bas. Il arrive aussi que nous débutions la soirée ailleurs, particulièrement au Trou.         

On peut rejoindre le DJ en marchant vers l’escalier, ce qui me laisse croire que son nid est un ancien placard allongé. Nous savons tous qu’il n’accepte pas des demandes spéciales. Il installe toujours le disque qui est en train de tourner à la vue de chacun, pour éviter les « C’est qui, qui joue? » Le gars est sympathique. Une fois, il m’avait laissé faire un enchaînement. J’étais au paradis! Les gens lui lancent sans cesse des compliments.        

La musique donne l’impression que ce sont souvent les mêmes disques, sauf qu’il a un choix tant et tant large qu’on a le sentiment que c’est du neuf. Engagement, par Charlebois, je suis incapable d’écouter ça chez moi, mais quand c’est au Rio, je yepyepyepe avec Robert. Tous les classiques du hard-rock sont au rendez-vous, avec le triumvirat sacré de Zep, Sabbath et Purple. Les incontournables rocks progressifs sont de la partie, tout comme le bon Québécois, avec Offenbach plusieurs fois par soir. Gerry qui éructe au Rio, c’est tellement remuant! Il n’y a pas de folklore ni de disco. Parfois, quelques chansons plus vieilles sont les bienvenues, par les Doors, Beatles et Stones.         

Mon oncle m’a raconté qu’au cours des années 1950, il lui arrivait de fréquenter le lieu, un cabaret avec des humoristes, des chanteuses exotiques avec castagnettes, et c’est sans doute pourquoi le club porte ce nom anachronique de Cabaret. Il y avait aussi de la danse sociale, type rumba. C’était un endroit très chic, semble-t-il.         

Plus tard, des groupes yéyé y sont passés. Peu après, il y eut un meurtre, provoquant une réputation qui subsiste chez les gens ne poussant jamais la porte blanche : le Rio est un repaire de motards et un endroit violent. Exactement le contraire de la réalité! C’est sûrement la boîte rock la moins dangereuse de Trois-Rivières. Partout ailleurs, j’ai vu des bousculades, entendu des engueulades. Jamais au Rio. Les serveurs ne le permettraient pas… surtout le chauve!         

La fermeture, comme partout ailleurs, a lieu à trois heures. Sauf qu’ils font le dernier appel dix minutes avant le moment fatal. On peut alors commander deux ou trois bouteilles. Même s’il n’y a alors plus de musique, que la lumière nous éblouit et que des chaises reposent sur les tables, nous pouvons demeurer là jusqu’à quatre et même cinq heures. On voit alors d’incroyables nuages de fumée de cigarette, se cognant contre les murs, s’incrustant au plafond. Un vrai de vrai club, c’est enfumé et rien d’autre. Comme il n’y a pas de fenêtres et que la porte ne donne pas directement dans le lieu, il n’y a aucune aération.



 

D'autres éléments du folklore relatifs au Rio apparaissent dans le roman, comme ce jeune aveugle sans cesse présent, avec son chien guide qui demeurait tranquille, malgré le bruit. Je parle aussi de ce fait qui va faire frémir les femmes : le coin d'aisance pour les gars était minuscule, avec une seule cabine et un seul urinoir. Alors, pas de gêne : il y en a qui pissaient dans le lavavo !

 

 

Le Rio est disparu dans un incendie en février 1982. Pour mon personnage vedette, c'était une catastrophe. Des années plus tard, le héros tente de retrouver ses amis de jeunesse. Le premier qu'il déniche posera un geste émotif. Passant devant le lieu reconstruit (et qui abrite un café yuppie), le type s'agenouille là où se trouvait la porte du Rio et garde une minute de silence.

 

 

Le fichier audio : Led Zeppelin, bien sûr.

 

Tags: #musique
 


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